Certains doivent s’en douter : en deux ans et demi, je ne me suis pas dépêchée pour aller assister à un match de football en Ecosse. Peut-être parce que je préfère les ceilidhq virevoltants aux cris de supporters, ou la chaleur du pub aux courants d’air du stade. Mais je dis toujours « oui » quand on me propose une nouvelle découverte, et quand mon ami Malcolm m’a proposé de l’accompagner au « choc » entre Hibernian, l’une des équipes d’Edimbourg, et les Rangers de Glasgow, j’ai enfilé mes moufles et je me suis précipitée au stade.
Le football en Ecosse, ça rime à quoi ?
Le commun des mortels, s’il est questionné sur le football en Ecosse, va probablement mentionner un nom et un seul : Celtic, l’un des deux clubs de Glasgow, et sans aucun doute l’équipe la plus célèbre d’Ecosse.
A Glasgow, les deux équipes historiques sont le Celtic et les Rangers. Tout les oppose. La première porte le vert, est historiquement catholique (mais cela n’a plus d’importance aujourd’hui, me dit-on), quand la deuxième porte le bleu (et le rouge) et est historiquement protestante.
Même modèle à Edimbourg, avec le Hibernian, le club de Leith, à l’est de la ville, et Heart of Midlothian, plus à l’ouest. « The Hibs » sont connus pour être soutenus par les classes plus populaires de l’est, et « The Hearts » par les classes plus aisées de l’ouest.
Celtic, Rangers, Hibs et Hearts se rencontrent fréquemment pendant la saison. Avec Aberdeen, ils se partagent le haut du tableau du championnat écossais, qui compte 12 équipes. Mais ça, ce n’est que la première division…
Ne me demandez pas plus de précisions techniques sur ce championnat écossais que je découvre tout juste. Ce que j’en voyais, jusqu’à présent, ce sont les foules de supporters qui sortent du stade, les écharpes vertes, les tatouages « Hibs » dans la nuque de certains passagers du bus, les télés dans les pubs. Mais si vous êtes intéressés, je vous conseille les comptes Twitter de Emma, une Française passionnée de football, elle-même arbitre, installée à Edimbourg, et ScottishFootball FR, un compte en français tenu par deux passionnés de football écossais. Et quand on leur demande de définir le football d’Ecosse, ils répondent tout simplement : « Passion, histoire, vie ».
Découvrir le football en Ecosse avec un match Hibernian – Rangers
Mercredi soir. 19 heures. Les trottoirs sont verglacés, les gens sont déjà au chaud chez eux, mais moi, je passe un pull supplémentaire et je vais retrouve mon ami Malcolm, qui m’invite à aller voir mon premier match de football en Ecosse. Nous avançons comme des petits pingouins vers le stade Easter Road, qui accueille les matches de l’équipe Hibernian depuis 1893. Impressionnant. Peu à peu, nous sommes rejoints par une armée grossissante de pingouins, qui avancent à petits pas précautionneux dans la même direction. Certains ont des bonnets verts, d’autres des bonnets bleus et rouges. Déjà, je m’étonne de la présence policière : agents au sol ou à cheval se trouvent partout. Les fans des Rangers sont invités à entrer dans le stade par une entrée différente, leurs cris et chants s’éloignent peu à peu du flot principal des supporters des Hibs, l’équipe du quartier. Mais l’ambiance est relax et on rejoint tranquillement nos sièges, juste au bord du terrain.
Puisque c’est mercredi soir, Malcolm prédit que le stade ne sera pas plein, mais moi je trouve que les allées se remplissent très vite, et la foule saura se montrer très présente durant le match, l’ambiance n’était donc pas en reste. Autour de moi, je vois des familles, des gens qui ont l’air d’être habitués à venir au stade, et beaucoup de jeunes, voire très jeunes. Une partie de moi pense : « mais dis-moi petit, tu n’as donc pas école demain? »
Je vais passer sur l’analyse footballistique du match : les Hibs ont perdu 2 à 1 face à des Rangers que je qualifierais d’assez chanceux, ce soir-là. Une ouverture du score pleine d’espoir de la part des Hibs, puis deux buts encaissés juste avant la mi-temps, sans que l’on comprenne ni pourquoi ni comment. C’est la vie. La deuxième mi-temps s’est déroulée exclusivement devant les cages adverses, mais les tentatives à répétition n’ont pas atteint leurs objectifs. La tribune des Rangers, en délire, n’a cessé de chanter et tambouriner lors de la seconde partie du match. Nous, on gardait les yeux rivés sur le ballon, qui ne toucha plus aucun filet jusqu’au coup de sifflet final. C’est le jeu !
Allez, des petites photos floues pour le plaisir…
Si l’ambiance était rigolote, je dois aussi dire que je n’ai jamais entendu autant d’insultes et de gros mots, mais que j’en ai ri à gorge déployée. Des « Come on ya old shite », « ya lazy fat bastard » et autres poèmes déclamés à la minute par une foule électrique. Je me demande si les joueurs l’entendent. Même si mon oreille n’est pas encore très exercée, j’ai noté quelques refrains marrants, tels que « Can you hear the Ranger sing? Nooo noo ? Can you hear the Rangers sing ? Nooo Nooo », en tapant des mains très fort.
Il est interdit de boire de l’alcool, alors les gens achètent des chocolats chauds, ce qui rend le tableau général encore plus cocasse. Sur la photo suivante, cadrée avec beaucoup de talent comme vous pouvez le voir, on voit les supporters des Rangers. C’est comme une page de « Où est Charlie? ». Certains agitent un Union Jack, le drapeau britannique, et la ribambelle de policiers est très dense. Drôle d’ambiance.
A la fin du match, la déception est palpable et le stade, côté Hibernian, se vide en quelques instants alors que les supporters des Rangers prolongent le plaisir en chantant et sautillant partout. Un peu déçue par le score – qui ne rêve pas de voir l’équipe du quartier gagner à la maison – je sors néanmoins ravie de l’expérience et touchée de voir tant de fans réunis pour supporter leur équipe. Ils sont tous des voisins, des habitants du quartier. Nous rentrons tous à pied, envahissant la rue, bloquant joyeusement toute voiture qui cherche à s’échapper. Toujours sur un rythme de pingouin sur la glace, au coeur de la nuit hivernale écossaise.